Charles Chamberland (1851-1908)

Société des Amis de Pasteur

Amis de Pasteur

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Devant la statue de Pasteur qu’on inaugure à Arbois le 29 septembre 1901, Charles Chamberland se souvient: « Il y a 26 ans à la même époque, je descendais à la gare d’Arbois et je m’acheminais vers la demeure de Pasteur.
Je venais avec la recommandation d’un de mes maîtres de l’Ecole Normale, M.Bertin, ami sincère et grand admirateur de Pasteur, solliciter de ce dernier l’honneur d’entrer dans son laboratoire…. Je fus bien accueilli. Quelques jours après j’étais admis dans ce fameux laboratoire de la rue d’Ulm… » Chamberland est alors, à son entrée chez Pasteur en 1875, un jeune agrégé de sciences physiques après ses études à l’Ecole Normale Supérieure (reçu à Polytechnique et à l’Ecole Normale, il choisit cette dernière). Il a une expérience d’un an d’enseignement à Nîmes.
Né à Chilly-le-Vignoble (Jura – France) le 12 mars 1851, il avait fait ses études au lycée Rouget-de-Lisle dans la ville voisine, Lons-le-Saunier, puis sa préparation aux concours des grandes écoles au collège Rollin à Paris.

Pasteur lui confie une première mission: vérifier les expériences de Henry Charlton Bastian défenseur de la génération spontanée – Bastian fait bouillir de l’urine pour détruire les germes, introduit de la potasse bouillie et met le tout dans un étuve. Au bout de quelques heures la préparation fourmille de microbes et Bastian conclut à la génération spontanée-. Chamberland montre que la température de 100° ne suffit pas pour tuer certains germes et qu’il faut chauffer à plus de 115°. Il vient d’établir les règles de la stérilisation des milieux de cultures et il imagine un système de chauffage sous pression à plus de 100°. L’autoclave Chamberland
deviendra l’outil indispensable des laboratoires de bactériologie et des services de chirurgie.

En 1878, Louis Pasteur a entrepris son travail sur le charbon du mouton. Chamberland, avec Emile Roux et le vétérinaire Auguste Vinsot, participe à l’étude sur le mode d’infection par la bactérie charbonneuse. Il en ressort que les spores de la bactérie sont transportées à la surface du sol par les vers de terre et que la maladie s’installe par des lésions du tractus digestif.
Une épidémie de charbon sévit à Savagna près de Chilly-le-Vignoble en 1878. M. Louvrier, un ancien médecin vétérinaire de Lons-le-Saunier, prétend combattre la maladie par un traitement inspiré des études pasteuriennes sur le charbon. Pasteur fait intervenir Chamberland dont le travail montre que l’efficacité du traitement de Louvrier ne peut être prouvée mais qu’un état réfractaire s’installe chez les animaux qui ont résisté à une première attaque de la maladie. Il participe également aux expériences de vérification du vaccin anticharbonneux de Toussaint, professeur à l’école vétérinaire de Toulouse, et démontre son inefficacité.
Pasteur tire parti de sa découverte du vaccin contre le choléra des poules pour mettre au point un vaccin contre le charbon en cultivant le microbe à 42-43° et en abandonnant la culture pendant plusieurs jours au contact de l’air. De son côté Chamberland prépare un vaccin en traitant la culture par un antiseptique: le bichromate de potassium. C’est son vaccin qui sera employé par Pasteur lors de l’expérience publique de Pouilly-le-Fort pendant laquelle tous les moutons vaccinés résisteront à l’inoculation du charbon alors que les non vaccinés mourront.
Les demandes de vaccin affluent au laboratoire de Pasteur, il faut créer une fabrique de vaccin charbonneux dont la direction est confiée à Chamberland qui deviendra plus tard directeur technique de « la Société de vaccin anti-charbonneux Pasteur ».

Dès le début de 1881, Pasteur, Chamberland et Roux, bientôt rejoints par Thuillier, ont entrepris l’étude de la rage qui aboutira à la vaccination de Joseph Meister le 6 juillet 1885 et de Jen-Baptiste Jupille le 20 octobre et à la construction par souscription du premier Institut Pasteur inauguré le 14 novembre 1888. Chamberland se voit confier la responsabilité du service de « microbie appliquée à l’hygiène et vaccins charbonneux » et fait partie du premier comité de rédaction des Annales de l’Institut Pasteur. A la mort de Pasteur en 1995,
Emile Duclaux prend la direction de l’Institut Pasteur et nomme Chamberland et Roux sous-directeurs.
Chamberland reste un bon technicien et imagine, lors d’une épidémie de typhoïde à Paris, un filtre en porcelaine pour débarrasser l’eau des microbes qu’elle transporte. « Le filtre Chamberland-système Pasteur » connaîtra un beau succès. En 1900, il établit dans un village voisin de Chilly-le-Vignoble, une petite fabrique de boîtes en bois destinées à l’expédition des vaccins dans le monde entier.


Chilly-le-Vignoble, le village natal, reste cher au cœur de Chamberland: c’est le village des vacances, il s’y promène, il y chasse et il participe à la vie communautaire. En 1885, il se présente avec succès aux élections législatives et réussit là où Pasteur avait échoué en 1876. Il est élu maire de son village en 1887 et tout le monde se plait à souligner sa bonté, sa générosité et son esprit de tolérance.
Le profit de ses découvertes (filtres, autoclaves, …) lui permet d’agrandir à deux reprises la maison vigneronne de sa mère et de faire construire une luxueuse villa qu’il appellera « la Toccade »! mais il décèdera dans son domicile parisien de la rue Dutot, près de l’Institut Pasteur le 2 mai 1908.
Avant le départ de son corps pour Chilly-le-Vignoble où il repose, Emile Roux, son ami, prononcera un discours d’adieu à la gare de Lyon. « Chamberland, dira t-il, a été un de ces êtres privilégiés qui font le bonheur autour d’eux ».

Sources:

  • Archives de l’Institut Pasteur, repères chronologiques.
  • Alain Marchal, catalogue de l’exposition « Charles Chamberland » à la Maison Natale (de mars à novembre 2010)